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Fusil, Calibre 30, Ml

Fusil, Calibre 30, Ml (le Garand) (Etats Unis)



Caractéristiques
Fusil Ml
Calibre : 7,62 mm.
Fonctionnement : emprunt des gaz 
Longueur : 1,10 m.
Longueur du canon : 609 mm.
Poids : 4,313 kg.
Vitesse initiale : 855 m/s.
Hausse : 1 097m. 
Capacité du chargeur : magasin (clip) de 8 cartouches.

Auteur : Pierre Lorain

LE GARAND M1, FUSIL D'UN HOMME FUSIL D'UNE GUERRE

En 1926, au moment où la France décidait de prendre pour modèle le fusil américain de 1917 et la cartouche allemande de 1914, c'est-à-dire de remplacer nos très anciens fusils d'infanterie par un modèle unique plus récent, nos amis d'outre-Atlantique avaient envisagé d'abandonner purement et simplement ce type d'arme qu'ils jugeaient dépassée. Un fusil semi-automatique, fruit des expériences de la Grande Guerre, était à l'étude aux U.S.A. Ironie du sort, les Français qui avaient été les premiers, dès 1917, à doter quelques-unes de leurs troupes de fusils semi-automatiques, s'en détournèrent sitôt la guerre terminée. Mais les Américains avaient observé avec le plus grand intérêt notre louable effort ; ils surent profiter de la leçon et mirent aussitôt en chantier un programme destiné à résoudre une fois pour toutes le problème du fusil d'infanterie semi-automatique qui avait été abordé dès le début du XXe siècle par la plupart des puissances européennes mais n'avait pu aboutir pour différentes raisons.

Une fois la décision prise, leur dynamisme, leur rigueur de raisonnement, leur persévérance dans l'effort, leur génie armurier hérité de la Guerre de Sécession et servi par une technique de premier ordre devaient bientôt avoir raison des difficultés sur les-quelles butaient les Européens depuis un quart de siècle.


 

L'ÉPISODE DU "FUSIL A  VERROU" DANS LA TRADITION ARMURIERS AMÉRICAINE

 L'ère du fusil de guerre à répétition à verrou n'aura été pour les Américains qu'un entracte, une rupture dans la continuité de leur tradition armu-rière nationale. Car le verrou, c'est l'Europe, essen-tiellement l'Allemagne et la France comme chefs de file avec Dreyse et Chassepot. Les Américains en firent l'emprunt car ils surent reconnaître la supériorité du verrou sur toutes les autres culasses pour les armes à répétition de petit calibre à grande puissance. Mais ils ne créèrent pas d'arme originale conçue suivant ce principe, à l'exception du fusil d'essai Hotchkiss de 1878.

Leur premier fusil à verrou réglementaire, adopté très tardivement en 1892, fut un fusil dano-norvégien " Krag-Jorgensen " à peine modifié ; le se¬cond et dernier de la famille fut le célèbre " Springfield 1903 " qui n'était autre qu'un Mauser réglementaire allemand habillé à la mode américaine. Rappelons pour mémoire que le fusil "U.S.-17", adopté faute de mieux pour répondre aux impératifs de la produc-tion de masse en temps de guerre, était lui, un fusil anglais !


 

LA LEÇON DE 1918 : UNE SOLUTION AMÉRICAINE AU PROBLÈME DU FUSIL SEMI-A UTOMATIQUE

Les Américains apprennent très vite ; dans les tranchées de 1918, ils s'aperçurent rapidement que le fusil d'infanterie à répétition manuelle, trop long, trop encombrant et trop lourd n'était pas l'arme la mieux adaptée à ce genre de combat et que sa très puissante cartouche, alliée à une hausse à longue portée, représentait en fait un gaspillage d'énergie au détriment de l'intensité du feu.

Les Allemands avaient trouvé la solution en adaptant la cartouche de leur arme de poing à une arme d'épaule, très courte et capable d'un automatisme intégral : le célèbre " M.P. ", arme infiniment plus efficace que le fusil à répétition pour le combat rapproché.

Mais le temps manquait pour étudier une arme équivalente à la nouvelle arme allemande. C'est alors que le génie armurier américain sortit de sa léthargie sous l'impulsion d'un jeune inventeur : -D. Pedersen qui imagina de remplacer le verrou des fusils Springfield par une culasse de pistolet automatique analogue au système Browning.

Une fois le verrou du fusil Springfield retiré, l'engin se glissait et se verrouillait en place ; un chargeur pouvant contenir 40 cartouches de pistolet de calibre 7,62 mm s'engageait sur le côté droit de la nouvelle culasse. L'arme-ment pour le premier coup se faisait à la façon d'un pistolet automatique Browning, en tirant la culasse vers l'arrière et en la laissant revenir en avant. Dans sa course vers l'avant, la première cartouche du chargeur se trouvait entraînée par le bloc de culasse mobile et s'engageait dans une chambre forée aux dimensions de la cartouche réduite et faisant partie intégrante du système amovible. Une pression sur la détente amenait le dé-part du coup ; sous l'effet de la pres-sion des gaz, la culasse mobile était lancée vers l'arrière en comprimant le ressort récupérateur ; dans le même temps, l'étui vide était extrait et éjecté.

En bout de course, le ressort en se décomprimant ramenait la culasse vers l'avant ; celle-ci happait au passage la seconde cartouche du chargeur et l'in-troduisait dans la chambre selon le cycle normal d'un pistolet automatique fonctionnant selon le principe de la "culasse non calée". Le tir "culasse fermée" ne pouvait se faire que coup par coup, chaque action du doigt sur la détente provoquant la mise à feu.

Ce petit " gadget " appelé " Pedersen device" transformait ainsi à peu de frais le fusil Springfield à verrou et à répétition manuelle en une carabine semi-automatique tirant une cartouche de pistolet. Lorsqu'on voulait réutiliser le fusil normal, il suffisait d'ôter le chargeur Pedersen, d'enlever la culasse Browning et de replacer le verrou réglementaire. Une cartouche spéciale, au calibre du fusil Springfield et de la capacité d'une cartouche de pistolet, avait été créée pour cette transformation Pedersen.

Une décision d'adoption fut prise en 1918. L'invention, entourée du plus grand secret (chaque guerre a son " arme secrète "), fut baptisée du sigle peu compromettant de " Model 1903 MK1" sans doute pour " tromper l'ennemi".

65 000 transformations Pedersen furent manufacturées et des fusils Springfield modifiés pour permettre l'utilisation du système. Cette modification consistait en peu de chose : simplement le forage d'une ouverture oblongue sur le côté gauche de la boîte de culasse afin de former une fenêtre d'éjection pour les étuis vides.

Le 11 novembre 1918 arriva sans que les mystérieux systèmes Pedersen aient pu être utilisés. Réalisant sans doute que le système, acceptable en théorie, n'était guère utilisable au combat, l'armée des États-Unis décida après la guerre de détruire tous ceux qui avaient été fabriqués. De rares exemplaires restent encore dans certains musées des U.S.A., notamment au John M. Browning Mémorial Mu­séum, à l'arsenal de Rock-Island et à l'Armurerie de Springfield.

 


 

 L'ISOLATIONNISME ET LE RETOUR AUX SOUR­CES TRADITIONNELLES AMÉRICAINES 1920, une brillante lignée d'inventeurs

 Si cette invention n'eut pas de suite parce qu'elle ne constituait qu'un ex­pédient, nous ne devons pas oublier le nom de Pedersen "qui, avec deux autres brillants inventeurs : Melvin M. Johnson et John C. Garand, reprit la grande tradition armurière américaine qui s'était créée un peu ayant la guerre de Sécession, à l'avènement de l'ère du machinisme et de la production de série, et qui avait subi une soudaine et brutale éclipse durant le premier quart du XXe siècle en raison de l'in­fluence prépondérante de l'Europe, et surtout de l'Allemagne, dans le do­maine des armes.

Nous voici donc en 1920. Pour les Américains, la cause est entendue : le fusil à répétition manuelle a vécu, les conditions imposées par la guerre mo­derne exigent la semi-automaticité si­non l'automacité totale pour les armes individuelles. L'arrêt de mort du Springfield se trouve donc scellé avec l'armistice de 1918.

 Dès 1920, les études et les réalisations expérimentales pour un F.S.A. natio­nal se suivent à un rythme rapide :

 -     Le colonel James L. Hatcher modi­fie le F. S. A. danois de Bang.

 -     Thompson fait établir par Coït un F. S. A. de calibre .30 fonctionnant par " augmentation d'inertie " ou " retard à l'ouverture".

 - John C. Garand présente un fusil très original fonctionnant par recul de l'amorce au départ du coup ; l'arme est théoriquement très séduisante en raison de la simplicité de son principe : le canon ne recule pas et il n'y a pas de tubulure à gaz ; c'est le seul recul de l'amorce qui se dessertit légèrement de l'étui et vient frapper la tête de cu­lasse. Ce mouvement suffisait à pro­voquer le déverrouillage et l'ouverture de la culasse mobile. Malheureuse­ment, les résultats des essais se révé­lèrent médiocres ; néanmoins, John Garand fut félicité pour son invention et invité à travailler à l'armurerie de Springfield à l'élaboration du nouveau fusil.

En 1923, J.D. Pedersen travaille éga­lement sous contrat à Springfield où on lui laisse la plus grande liberté de recherche, notamment en ce qui concerne l'étude d'une cartouche nou­velle destinée à remplacer la cartouche du Springfield " 30-06 ". Un nouveau calibre de .276 (7 mm) est envisagé et Pedersen présente, avec cette nouvelle cartouche, un F. S. A. fonctionnant par " retard à l'ouverture " au moyen d'un levier à genouillère ressemblant au système utilisé sur le pistolet al­lemand " Parabellum ".

Mais ces fusils, que ce soit le Thomp­son fabriqué par Coït ou le Pedersen, exigent des cartouches spécialement lubrifiées pour pouvoir fonctionner correctement. Des dispositifs autolu­brifiants composés de tampons de feu­tre imbibés d'huile spéciale sont incor­porés dans les magasins des armes ; mais le procédé n'est guère élégant et complique le système.

 


1936 : LE F.S.A. DE JOHN GARAND EST ADOPTÉ

1957:   IL   DISPARAIT APRÈS  DE  BRILLANTS ÉTATS DE SERVICE

Le fusil de John Garand, rechambré et recanonné au calibre "30-06", est essayé en 1934 ; il donne entière sa­tisfaction et une décision d'adoption définitive est prise le 9 janvier 1936. La fabrication de masse commencera bientôt, en vue de l'armement de tou­tes les forces armées des États-Unis. Les machines-outils destinées à la fa­brication des fusils Springfield 1903 sont mises en réserve et la fabrica­tion des armes à verrou cesse progres­sivement après cette date. Le nouveau fusil américain prend la dénomination réglementaire de " U. S. Rifle cal. 30 Ml" ; il sera communément appelé par tous ceux qui l'utiliseront durant la Seconde Guerre mondiale : "fusil Ml" ou "fusil Garand".

Il est décidé que ce fusil sera fabri­qué à l'arsenal de Springfield et, sous contrat, par la " Winchester Co. ". En 1940, la production de l'arme nouvelle se monte à 50000 unités. En 1945, le chiffre de production to­tale atteindra plus de 4040000 armes,  dont 513582 fabriquées par Winchester.

Peu de temps après la Seconde Guerre mondiale, probablement au moment de la guerre de Corée, 600 000 fusils Garand supplémentai­res seront manufacturés sous contrat par deux firmes privées : "Springfield International Harvester " et " Har-rington et Richardson ". Ce qui porte le total de la production aux U.S.A. à plus de 4 640 000 fusils.

En Italie, l'arsenal de Breda et la firme "Beretta" obtiennent, dans les années 1950, l'autorisation de fabriquer des fusils Garand pour l'armée italienne, l'armée danoise et l'Indonésie. En 1953, avec la création de l'O.T.A.N., un certain nombre de fusils M-l furent chambrés pour tirer la nouvelle cartouche du pacte. Ces fu­sils furent notamment en service dans l'U.S. Navy.

Mais le " Garand " est l'arme d'un homme et l'arme d'une guerre; en fait, la Seconde Guerre mondiale ter­minée, le fusil Garand mourut avec elle. Il naquit du néant, aucune in­fluence étrangère ne peut valablement lui être rattachée, il n'a pas d'arbre gé­néalogique. Étroitement lié à la Se­conde Guerre mondiale, le fusil de John C. Garand restera dans l'histoire des armes à feu comme l'une des armes individuelles les mieux venues et les plus représentatives. Contrairement à son prédécesseur, le Springfield 1903, le fusil Garand est bien connu chez nous. La 2e division blindée du général Leclerc équipée à l'américaine en était pourvue, de même que de nombreuses unités de la nouvelle armée française qui parti­cipèrent aux combats de 1945. Le " M-l ", distribué en très grosses quantités, devint ainsi, au même titre que le pistolet Coït, une arme régle­mentaire française par destination ; le Garand fit les guerres d'Indochine et d'Algérie ; entre 1950 et 1960, il constituait l'armement principal de nom­breuses unités de notre armée, concur­remment avec le F.S.A. MAS 49-56.


 

EN GUISE DE CONCLUSION: D'UNE   OPINION  PER­SONNELLE A LA SANC­TION DES FAITS

L'expérience nous a appris à nous dé­fier a priori de la valeur des "souve­nirs personnels " et des " témoigna­ges " d'anciens utilisateurs de telle ou telle arme. Bien souvent, l'esprit de passion l'emporte sur la rigueur logi­que et le simple bon sens ; des légen­des se créent bientôt, colportées parmi les combattants, ce qui contribue à leur donner droit de cité et valeur de vérités premières. Il est ensuite bien difficile de trier le vrai du faux. Nous pourrions citer entre autres légendes : La balle du Coït jetait un homme par terre, les Stens partaient toutes seules, la carabine américaine n'avait aucune puissance d'arrêt, les Italiens avaient des fusils qui éclataient entre les mains de leurs utilisateurs, le fusil français 07-15 groupait toutes ses balles à 200 mètres dans un boîtier de montre... nous en passons et des meilleures.

Qu'il me soit cependant permis de donner ici mon opinion personnelle sur le fusil Garand en faisant appel à des souvenirs déjà lointains :

Nous nous rappelons d'un point fort encadré par deux points faibles. Le point fort étant celui du tir propre­ment dit : avec le souvenir d'une arme qui ne s'enrayait pas, dont le recul était très supportable si on le compa­rait à celui du Mauser 98 K, d'un sys­tème de hausse qui permettait un ré­glage du tir rapide, précis et stable (avec un fusil qu'il ne connaissait pas, un bon tireur centrait ses impacts en quatre ou cinq coups), un tir rapide, une détente impeccable. En un mot, le fusil américain M-l nous apparais­sait, en 1944, comme étant, de loin, le meilleur fusil. Deux légers points faibles cependant : le chargeur vide que nous recevions invariablement dans la figure après le dernier coup de feu tiré, ce qui, après avoir eu l'arcade sourcilière fendue, nous faisait réguliè­rement donner un coup de doigt et fermer les yeux lors du départ de la 8e et dernière cartouche du chargeur. Enfin, une seule fois pour être précis, le levier de commande grippé qui ne put se débloquer qu'avec un vigoureux coup de talon de "rangers".

Mais les deux points faibles dont les souvenirs sont restés les mieux ancrés chez tous nos camarades sont bien : d'une part, le poids et le volume ex­cessifs de l'arme, lourde à porter et pé­nible à manier ; d'autre part, la com­plexité des opérations de démontage et de remontage nécessaires pour pouvoir ôter la culasse et nettoyer convenablement le fusil. Quelle corvée, lorsque la fatigue se mêlant à l'énervement nous faisaient égarer cet " axe du bras d'élévateur " que l'on avait au préa­lable chassé avec la pointe d'une balle, et combien alors nous regrettions nos "Lee-Enfield" ou nos " MAS-36 " qui se démontaient complètement en quelques secondes et qui ne nécessi­taient même aucun entretien si le temps avait fait défaut.

 Les notices d'emploi spécifiaient : " Le fusil Ml doit être maintenu propre et convenablement huilé. Une négligence en ce sens peut être sanctionnée par des enrayages à un moment critique. Le fusil doit être démonté tous les soirs ".

 Or, convenablement huilé signifie ni trop ni pas assez ; certaines pièces de­vaient recevoir une mince pellicule d'huile, d'autres devaient être sèches ; le cylindre à gaz faisait l'objet de soins particuliers et le nettoyage du canon par la bouche n'était pas des plus commode. Quant au démontage de toutes les pièces qu'il fallait placer sur une toile tendue, il était notre cauchemar à tous.

Voilà les souvenirs personnels qui me sont restés du Garand ; il est juste de reconnaître que, malgré ses inconvénients qui étaient très réels, ses avantages le plaçaient, au point de vue de l'efficacité au combat, sur un plan supérieur à tous les autres fusils à verrou en usage au cours de la Seconde Guerre mondiale.
En sachant décider de l'adoption de principe d'un F.S.A. dès les années 1920, les États-Unis devaient être le seul pays à avoir pu doter la quasi-totalité de leur armée d'une arme individuelle semi-automatique en 1941. L'avènement du Garand rendait caducs tous les fusils d'infanterie alors en service.
Si le Garand présentait plus de qualités que de défauts, il faut croire que ces derniers, que nous venons d'énumérer de mémoire avec tout ce que cela peut représenter d'arbitraire et de personnel, furent cependant reconnus comme tels, puisque, au début de 1944, l'armurerie de Springfield et la compagnie Remington Arms reçurent les directives suivantes :

Etudier un fusil à tir sélectif à partir du "M-l":

 -   Pesant moins de 4 kg et ayant un canon raccourci ;

 -   Possédant un mécanisme simple qui puisse être démonté sur le champ de bataille ;

 -   Possédant une boîte chargeur d'une contenance de 20 cartouches pouvant être introduite par en dessous, à la manière du fusil anglais Lee-Enfield ou du fusil mitrailleur B.A.R.

 En clair, c'était dire : le fusil " M-l " est trop long, trop lourd, trop encom­brant ; son mécanisme est trop com­pliqué, son système de chargeur dé­fectueux et la capacité de son magasin insuffisante. C'était en même temps reconnaître la vérité première émise dès la Guerre de Sécession par le gé­néral confédéré James Trudeau : pour les armes de cavalerie, le point qui importe le plus est la rapidité du tir. Ceux-là seuls qui n'ont pas fait la guerre en contesteront l'importance... Vérité qui prenait toute son impor­tance avec les combats du Pacifique ou lorsqu'il s'agissait d'agir contre un ennemi en supériorité numérique lo­cale.

 Ainsi, à la fin de la guerre, un nou­veau fusil était en gestation aux États-Unis. Disons pour terminer que John Ga­rand (1886-1974) fut le premier citoyen américain à recevoir, à titre civil, la " Medal of Honor" en 1944, en reconnaissance des services rendus. Une juste récompense s'il en fut.


 Les variantes du M1

Essentiellement il n'y en a que deux, qui sont les versions " tireurs d'élite " :

-    Le " 30 Ml C " a été adopté en juin 1944 ; c'est un fusil Garand ordinaire avec une joue en cuir lacée sur la crosse, équipé d'une lunette M73 (Lyman " Alaskan ") ou M73-B1 (Weaver 330) et d'un cache-flamme démonta­ble adopté, lui, en janvier 1945 ;

-    Le "30 Ml D", adopté en septembre 1944,  est  identique au  précédent  à l'exception du système de montage de la lunette qui est en général une M73 Lyman.

Notons cependant une tentative expé­rimentale de raccourcissement et d'al­légement de l'arme, le canon étant ra­mené à 457 mm. La détonation, le souffle et le recul se révélant insup­portables, les essais ne furent pas poussés plus avant.

C'est alors que John Garand présente un fusil fonctionnant d'une façon beaucoup plus classique, par " em­prunt de gaz " ; si l'arme est plus compliquée que les précédentes, elle fonctionne parfaitement avec des car­touches " sèches " ordinaires. L'arme expérimentale a été établie en calibre .276 et tire la même cartouche que celle prévue pour le fusil Pedersen.

C'est en juillet 1929, sur le terrain d'essais d'Aberdeen, que le fusil Pe­dersen est opposé au fusil Garand. C'est ce dernier qui remporte l'épreuve. La commission décide aus­sitôt d'un principe d'adoption du fusil présenté par Garand, à condition qu'il soit fabriqué en calibre .30 (7,62 mm) pour tirer l'ancienne cartouche du Springfield. C'est le général Douglas MacArthur, alors chef d'état-major qui prit la décision de conserver la cartou­che réglementaire en service.

 


La cartouche du Garand : prélude à l'abandon de la cartouche conventionnelle

Avec la cartouche " Ml " de 1924, les Etats-Unis disposaient d'une des cartouches les plus puissantes, sinon de la cartouche la plus puissante, utilisée dans un fusil de guerre. Ses qualités de tension de trajectoire faisaient de l'ensemble " fusil Springfield-cartou-che Ml " un système se plaçant au sommet des armes mondiales à verrou.

Pedersen et Garand réalisèrent très vite, lors de leurs étudesxsur les fusils semi-automatiques, que cette cartou-che était trop puissante et donnait des pressions trop considérables pour un bon fonctionnement dans une arme automatique légère, quel que soit le principe utilisé : " ouverture retardée " ou " emprunt de gaz ". Lorsque le général MacArthur insista pour que l'on conserve avec le nouveau fusil l'ancienne cartouche du Springfield, en fait, les ingénieurs ne purent conserver que ses dimensions et son aspect extérieur, mais ils durent diminuer le poids de la balle et les caractéristiques de la charge, afin d'obtenir des pres-sions acceptables pour l'arme nouvelle. Il en résulta la cartouche dite " M2 " à balle légère de 9,8 g (au lieu de 11,3g) pour une vitesse initiale légèrement inférieure à celle de la balle " Ml ". On était en fait obligé de revenir à la cartouche " 30-06 " de la Première Guerre mondiale et même d'abaisser les pressions internes du canon au-dessous de 2 800 g/cm2. Tout ceci peut sembler bien académique car, sur le plan de l'efficacité du tir de guerre, aucune différence ne pouvait être faite par le soldat entre les qualités respectives d'une cartouche " Ml " ou " M2 ". Les différences ne portaient que sur des chiffres, mais ces chiffres constituaient le premier indice que l'ère des cartouches très puissantes des fusils de guerre conventionnels était sur son déclin. Nos lecteurs pourront se reporter au numéro précédent de la Gazette des Armes pour comparer les propriétés balistiques des diverses cartouches réglementaires américaines de calibre .30 et pour connaître le code de couleur de la pointe des balles.